Certains noms reviennent plus fréquemment que d’autres dans l’actualité sanitaire et sociale de notre pays.
C’est notamment le cas de Thomas Fatôme.
Il est directeur général de la Caisse nationale de l’Assurance Maladie (et de l’Union nationale des caisses d’assurance maladie) depuis le 17 août 2020.
Qui est Thomas Fatôme ?
Diplômé d'HEC, titulaire d'un diplôme d'études approfondies (DEA) de droit public et ancien élève de l'Ecole nationale d'administration (ENA), Thomas Fatôme, 49 ans, a rejoint l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) à sa sortie de l'ENA en 2000.
Après avoir été conseiller technique dans les cabinets des anciens ministres chargés de la santé, Jean-François Mattei puis Philippe Douste-Blazy et, dans le même temps, de son secrétaire d'Etat à l'assurance maladie, Xavier Bertrand, Thomas Fatôme a rejoint la Cnam en avril 2005 en tant que directeur de cabinet du directeur général d'alors, Frédéric van Roekeghem.
Thomas Fatôme a ensuite dirigé entre mars 2008 et octobre 2009 le cabinet de l'ancien secrétaire d'Etat chargé de l'emploi, Laurent Wauquiez, et assuré la direction adjointe du cabinet de la ministre de l'économie, de l'emploi et de l'industrie, Christine Lagarde, avant de rejoindre la direction de la sécurité sociale (DSS) en tant que chef de service.
Puis il a été nommé en novembre 2010 conseiller chargé de la santé, de la dépendance et des politiques sociales au cabinet de Nicolas Sarkozy, avant d'être promu conseiller à la présidence de République en mars 2011.
Il assurera ensuite la direction de la sécurité sociale de janvier 2012 à juin 2017, avant de rejoindre l'équipe du premier ministre, Edouard Philippe, dont il a été directeur de cabinet adjoint jusqu'en juillet 2020, date de la nomination de Jean Castex à Matignon.
Il prendra ses fonctions de directeur général de la Cnam/UNCAM le 17 août 2020, poste qu’il occupe depuis cette date, succédant à Nicolas Revel.
Il a ainsi participé à la négociation de deux avenants (n°10 et n°11) à la convention nationale des transporteurs sanitaires.
Ce parcours témoigne d’un engagement fort sur les sujets ayant trait à la santé et à la protection sociale.
Posons-lui quelques questions pour connaître sa vision du transport sanitaire.
Une convention nationale conclue en 2002 à laquelle se sont ajoutés au fil des ans 11 avenants. La Fédération nationale des ambulanciers privés plaide depuis 2 ans pour une refonte de ces textes devenus complexes et illisibles. Le moment est-il venu ?
Il faut savoir qu’un avenant peut comporter des avancées majeures. Par exemple, l’avenant 11 représentait une enveloppe globale de 340 M€. Il ne faudrait donc pas penser que rien n’a été fait depuis 2002.
Je reconnais toutefois que les avenants se sont accumulés et rendent difficilement lisibles la convention. Il est nécessaire de travailler, en co-construction avec les fédérations représentatives, sur un texte rénové permettant d’intégrer toutes les évolutions apportées par les avenants. Ce texte devra également mieux mettre en avant les missions des transporteurs sanitaires auprès des patients, notamment en termes d’accès aux soins.
Qu’attendez-vous des prochaines discussions conventionnelles et quelles sont vos ambitions pour le transport sanitaire en général et plus particulièrement pour le transport des patients répondant à certaines spécificités (transport bariatrique, psychiatrique, pédiatrique…) ?
Les prochaines discussions doivent renforcer et valoriser les missions et le rôle des transporteurs sanitaires au sein du système de santé. Certaines réformes déjà menées ont permis d’aller en ce sens, comme la réforme TUPH, même s’il conviendra d’évaluer et d’ajuster les paramètres du modèle (paramètres organisationnels et économiques).
Aujourd’hui, nous avons un sujet d’accès aux soins et d’efficience.
D’accès aux soins, car les transporteurs jouent en effet un rôle clé sur tout sur le territoire ; mais il convient de lutter aujourd’hui contre les carences qui peuvent concerner les enfants en situation de polyhandicap et plus globalement tous les transports de personnes à mobilité réduite (TPMR), même si des valorisations TPMR ont déjà été actées dans l’avenant 11.
Les transports bariatriques constituent une offre de transports également indispensable dans la chaîne de soin. Dès que le cahier des charges sera finalisé par le ministère de la santé, nous proposerons, conventionnellement, un modèle économique revalorisant ces transports afin que les patients concernés ne renoncent pas à l’accès aux soins ou fassent appel en dernier recours aux transports urgents.
D’efficience, enfin, car le poste des dépenses de transports est dynamique ; il a ainsi augmenté de 9,3% en 2023 par rapport à 2022. Nous devons trouver, ensemble, des moyens de rationaliser ces dépenses, en faisant, notamment, du transport partagé la pratique de référence. Pour ce faire, l’Assurance Maladie propose plusieurs leviers pour aider au déploiement de ce transport, dont le taux de recours est de 19% à fin 2023. Des dispositions conventionnelles ont été prises pour inciter les transporteurs sanitaires par le biais de dispositifs financiers en flux (bonus-malus sur la part des transports partagés). L’avenant 11 propose également une avancée avec des taux d’abattement préférentiels pour les VSL réalisant du transport partagé.
Sur l’aspect organisationnel, nous menons actuellement des travaux, avec le ministère, sur les plateformes de commande de transport au sein des établissements de santé.
Enfin, l’article 69 du PLFSS pour 2024 prévoit une disposition de nature à renforcer le recours du transport partagé dans la mesure où les patients sans incompatibilité médicale qui refuseraient ce type de transport devront procéder à l’avance de frais. Cette mesure, une fois ses modalités d’application précisées, devrait permettre d’augmenter le taux de recours au transport partagé.
L’ambulancier est un acteur du transport, mais c’est également un professionnel de santé. Alors que l’accès aux soins est plus difficile que jamais sur le territoire, ne faudrait-il pas élever la profession d’ambulancier et l’autoriser, après avoir été formée, à effectuer de nouveaux actes de soins ? Ou encore veiller à mieux l’intégrer dans l’offre de soins ?
C’est un sujet qui ressort davantage de la compétence du ministère de la santé. A ce titre, le décret du 22 avril 2022 a autorisé les ambulanciers à réaliser de nouveaux actes professionnels dans le cadre de l’aide médicale d’urgente. Des élargissements de compétence peuvent aussi être envisagés – je pense, par exemple, à la téléconsultation assistée, avec un médecin régulateur. C’est un sujet sur lequel nous devons réfléchir, ensemble, à la façon dont nous pourrions soutenir voire inscrire les évolutions de compétences des ambulanciers dans la convention.
Les acteurs concourant à la prise en soins des patients dans le cadre de leur transport sont nombreux et dissemblables (ambulances, VSL, taxis, sapeurs-pompiers…). Mais alors qu’ils concourent tous au transport des patients, ils sont soumis à des règles différentes (sociales, fiscales, tarifaires). Cette situation est critiquable en termes d’équité et de justice. Seriez-vous favorable à une harmonisation ? Quels seraient vos leviers d’action ?
Pour répondre aux besoins d’accès aux soins, il est essentiel de mobiliser l’ensemble des acteurs. Pour cela, et bien que les réglementations fiscales et sociales ne relèvent pas de la compétence de l’Assurance Maladie, nous devons mettre en place les conditions pour que tous ces acteurs puissent développer un modèle économique cohérent et viable, tout en tenant compte de la soutenabilité de notre système de santé. Nous intégrons naturellement cette dimension dans le cadre de nos discussions avec les différentes professions, en tenant compte des spécificités de chacune d’entre elles.
Par ailleurs, et je le mentionnais plus haut, sur le transport partagé, nous travaillons activement pour le renforcer et le rendre plus accessible. C’est un axe essentiel de nos discussions avec l’ensemble des parties prenantes sur le sujet.