Madame, Monsieur, Chers collègues,
Monsieur Denis Morin, nouveau directeur de cabinet de madame la Ministre de la Santé, a réuni, le 1 Février 2013 à 17h30, les représentants de la profession du transport sanitaire pour une concertation nationale autour de l’expérimentation relative au transport de patients prévue par l’article 44 de la loi de financement de la sécurité sociale, pour 2013. Cette première réunion de concertation avait pour objectif de clarifier le périmètre de l’expérimentation et de définir les axes de travail pour la mise en place des appels d’offres. De même il était prévu d’établir conjointement un calendrier prévisionnel des étapes préalables avant le lancement opérationnel des expérimentations.
Nos oppositions aux appels d’offres sont des opportunités supplémentaires pour dire le caractère inapproprié de ce choix. C’est une façon de relancer le débat que nous n’avons pas eu lors de la préparation du PLFSS 2013.
C’est dans ce contexte qu’un tour de table a pu se faire, sans concession. Nous avons voulu rappeler le caractère sanitaire de nos transports, leurs exigences et contraintes. Nous avons dit l’importance de notre présence sur le territoire, des gardes que nous assurions et de l’état anémié de nos entreprises. Nous avons soulevé l’importance du VSL dans les TAP, souligné que la valorisation financière de 2012 et celle au 1/2/2013 ne compensent pas l’augmentation mécanique des charges. Au passage il a été rappelé que ces ajustements financiers devaient être accompagnés d’un nouveau modèle fonctionnel, qui n’a pas été mis en place. Si les VSL, avec ses 25 millions de transports font autant de transports que les taxis, nous avons redit que la facture Taxi, pour l’assurance maladie, était de 300 millions d’Euros de plus que les VSL (rapport de la cour des comptes septembre 2012).
De nombreuses situations anormales ont étaient énoncées. Nous avons voulu savoir si les ambulances hospitalières rentreraient dans les appels d’offres et capteraient les enveloppes de ville ? Nous n’avons pas eu de réponse. Au fur et à mesure de nos échanges la disparité des acteurs, la multiplicité des tarifications, les écarts d’exigences entre les différents opérateurs montrent l’immaturité de la proposition d’appel d’offre. Il n’y a pas de mesure de protection économique et sociale, pour les entreprises non retenues, comme cela devrait l’être, dans ce contexte expérimental d’appel d’offre.
Après avoir entendu cet inventaire d’iniquités, le ministère a fait une tentative d’explications des documents remis. Les objectifs de la mesure d’appel d’offre étaient les suivants :
1- Développer une approche territoriale de la commande de transports impliquant l’ensemble des acteurs compétents en matière d’organisation et de financement.
2- Apporter une réponse appropriée aux besoins du patient.
3- Développer la qualité de service rendu aux patients.
4- Maîtrise les dépenses de transports.
5- Favoriser une plus grande productivité des entreprises de transport de patients au travers d’une organisation plus fluide et territorialement mieux répartie (planification de l’activité, garantie de patients…).
Nos commentaires et réactions aux différents points ont été les suivants :
Objectif 1 : Nous avons du mal à comprendre comment une démarche d’appel d’offre va pouvoir impliquer l’ensemble des acteurs alors que le principe d’appel d’offre est de ne garder que le moins disant ?
Objectif 2 : L’appel d’offre n’est pas une revendication du patient, ni même une attente de sa part. Le transport partagé n’est pas une demande qui émane de lui. Même si le patient, contribuable comme nous, a tout à gagner d’une optimisation des dépenses de l’assurance maladie, il est très satisfait d’avoir un véhicule et un chauffeur disponible pour ses transports sanitaires. Le changement ne viendra pas de lui.
Objectif 3 : Comme pour le point 2, l’appel d’offre n’est pas un processus qui induit la qualité du service rendu. En voulant réduire des coûts issus d’une tarification déjà basse, pour les transporteurs sanitaires, il y a de grande chance que le service rendu y perde en qualité.
Objectif 4 : A ce niveau-là, de façon primaire, on pourrait penser qu’il y aura une maîtrise des dépenses. Sauf si le résultat de l’appel d’offre est supérieur à la tarification en vigueur. Si l’appel d’offre met en grande difficulté l’entreprise adjudicataire et qu’il faille la remplacer, cela se fera à quel coût ? Sans compter les perturbations globales occasionnées par la succession d’opérateurs, si tous les trois ans ils doivent changer. Là encore l’histoire des appels d’offres a montré ses limites. Dans le cas d’un marché aussi disparate que celui du TAP, il est clair que l’expérimentation proposée dans l’article 44 est totalement inappropriée. C’est un non-sens économique et organisationnel.
Objectif 5 : L’appel d’offre, une fois de plus n’est pas en mesure de répondre à cet objectif. Nous avons pu rappeler que ces appels d’offres n’aborderaient pas, en profondeur, la réforme nécessaire de l’organisation. Ce n’est pas avec la logique du moindre coût du transport que l’on modifiera le comportement des prescripteurs, la répartition équilibrée des lits hospitaliers ou la gestion des flux hospitaliers, etc.
Un calendrier nous a été également présenté faisant ressortir une mise en place des appels d’offres à la fin du premier semestre 2014. Enfin nous avons entendu que les choix des territoires expérimentaux n’avait pas été choisis .
Pour le reste des propositions du ministère, aucune réponse n’a été avancée. Les éléments que nous avons apportés, lors de cette concertation, ont figé l’avancement du projet. Nos trois fédérations ne participeront pas à des travaux préparatoires à l’expérimentation des appels d’offres tant qu’une clarification de la profession ne serait pas réalisée.
Nous avons rejeté toute planification et toute démarche de concertation qui ne passeraient pas par un travail préalable.
Nous avons demandé :
1- L’harmonisation des TAP. Que soient définis les acteurs pressentis pour les appels d’offres, au-delà des taxis et des VSL ! Quid des ambulances hospitalières ... ? Mettre tous les acteurs sur un même pied d’égalité.
2- La clarification du transfert des salariés vers les entreprises adjudicataires. A ce jour rien n’est prévu. Quelles seront les règles sociales mises en œuvre pour garantir l’emploi ?
3- D’avoir une réponse quant au problème de fiscalité au regard de nos véhicules amortis sur 5 ans alors que l’appel d’offre ne couvre que 3 ans !
4- Quelle sera la position de l’état au cas où des entreprises, n’ayant pas eu le marché, seront, de fait, en grandes difficultés, alors que l’expérimentation sera jugée non satisfaisante ?
Comment dire qu’un appel d’offre est équitable quand les acteurs ne sont pas régis par les mêmes lois, induisant des charges et contraintes de natures différentes ?
D’un autre côté, nos expérimentations, en cours, sont maintenues et même soutenues. Nous avons rappelé la nécessité de les évaluer. Il s’agit de montrer qu’une démarche centrée sur l’organisation apportera toutes les réponses aux objectifs attendus, sans pour autant mettre en danger les entreprises et affaiblir la qualité des transports due aux patients. Le plan stratégique proposé par nos trois fédérations a l’avantage d’exister et d’apporter des réponses efficientes, sur le fond, aux enjeux actuels.
En attendant nous encourageons, une nouvelle fois, les transporteurs sanitaires à se regrouper localement, sous la forme la plus opportune possible, afin de proposer une organisation qui s’inspirerait du plan stratégique porté par la FNAA, FNAP et FNTS.
La concertation n’étant pas fermée, nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l’évolution de ce dossier.
Bernard PELLETIER
Président de la FNAP