Article publié dans le Progrés Edition LES ROUSSES par Laëtitia COURTI le Mercredi 11 septembre 2019
La société, constituée de 18 salariés et de huit ambulances, est menacée de perdre son agrément pour « manquements à ses obligations ». Son patron assure que ces ambulanciers auraient pu intervenir mais n'ont pas été appelés.
Décidément, entre l'Agence régionale de santé (ARS) et le haut Jura, l'histoire d'amour n'aura pas lieu ! Actuellement, les Ambulances des 4 villages, implantées aux Rousses, risquent de perdre leur agrément « dans le cadre de manquements liés aux obligations de cet agrément (prise en charge des urgences préhospitalières à la demande du centre 15) ». « Encore faudrait-il qu'on nous appelle ! », lance le patron.
« On ne nous sollicite pas ! »
Yves Bailly-Maître a demandé à l'ARS le tableau des appels du Samu auxquels sa société n'aurait pas répondu. Il l'attend toujours... « Si j'obtiens ces informations, comme on est informatisé, je pourrai prouver qu'on était bien disponibles mais qu'on ne nous a pas appelés. Certains jours, mon personnel ne fait qu'attendre. Vu le territoire à couvrir, c'est bien la preuve qu'on ne nous sollicite pas ! »
Le soutien des médecins
Yves Bailly-Maître gère huit ambulances et 18 salariés. « Si on disparaît ; ce sont les pompes funèbres générales qui vont venir chercher les hauts jurassiens... » Les Ambulances des 4 villages ont reçu de multiples attestations de médecins du secteur et des urgences de l'hôpital de Morez affirmant qu'ils ne pourraient se-passer de la présence, sur place, de ces ambulanciers.
Le Progrès a demandé à l'ARS ce qui se passerait pour le haut Jura si, effectivement, les Ambulances des 4 Villages n'avaient plus d'agrément. Qui pourrait intervenir ? La réponse a été faite par mail, par le service communication (comme d'habitude) : « L'agence n'en est pas encore à ce stade. Dans l'hypothèse où la sanction maximale de retrait d'agrément serait prononcée, celui-ci aurait bien entendu vocation à être réattribué à un autre opérateur.»
« Ça fait treize ans qu'on travaille sur ce secteur, rappelle Yves Bailly-Maître. On signe des conventions chaque année pour intervenir sur les pistes de ski, les gens nous font confiance et disent qu'on fait un boulot de qualité. Nous, on a toujours tenu nos engagements. » II espère juste pouvoir continuer à le faire.
Laëtitia COURTI
« L'hôpital de Saint-Claude nous doit 5OO OOO€ !»
L'avocat d'Yves Bailly-Maître a lancé une procédure dans le cadre d'une dette qu'aurait l'hôpital Louis-Jaillon envers les Ambulances des 4 villages. Explications : à l'été 2018, l'hôpital lance un appel d'offres pour trouver un équipage de Service mobile d'urgence, et de réanimation (Smur) à l'année, soit un véhicule et deux personnels disponibles 24h/24,7j/7.
« Ce qui coûte minimum 475 000 € à l'année, sans réaliser de bénéfices, d'après ce qu'ont estimé les ambulanciers de France », précise Yves Bailly-Maître. Comme d'autres sociétés d'ambulances, la sienne répond à l'appel d'offres. Mais celui-ci sera déclaré caduque. « Les tarifs étaient trop élevés pour l'hôpital. » Vu que les Ambulances des 4 villages assuraient jusque-là cette mission, Yves Bailly-Maître envoie ses tarifs à l'établissement le 21 août 2018, par courrier avec accusé de réception, et met en copie la Préfecture du Jura.
« On nous paye les transports, mais pas l'immobilisation »
« Mon équipage est donc resté sur place, à l'hôpital. Sauf que ce dernier ne nous a pas payé l'immobilisation depuis des mois ! Il ne nous paie que les transports. Et nous doit donc 500 000 €. » Le Progrès a sollicité le directeur de l'hôpital. Sans résultat. Nos collègues de fronce 3 auraient reçu ces explications par mail : la direction de l'hôpital de Saint-Claude dit « avoir contesté une partie de la facturation » et « transmis le dossier à un cabinet d'avocats ».
« On a participé à une réunion à l'hôpital, raconte Yves Bailly-Maître. Ils voulaient que je diminue le montant de leur dette ! Sauf que je savais déjà que l'hôpital avait bien l'intention de réinternaliser un Smur et donc, de ne plus faire appel à nos services. Alors quoi ? Ils voulaient que je réduise leur ardoise pour mieux me jeter après ? »
Yves Bailly-Maître refuse encore aujourd'hui de dire à son équipage immobilisé à l'hôpital san-claudien de stopper sa mission. « Comme on risque de perdre notre agrément, si jamais il y a un souci et qu'on n'est plus là pour intervenir, ça va nous retomber dessus. Et puis, en toute conscience, je me sentirais trop coupable s'il arrivait quelque chose de fatal alors que mon équipage n'est plus sur place. »
Une présence « vitale »
« La présence des Ambulances des 4 villages est fondamentale, voire vitale, explique le docteur Jean-Marc Bougaud, responsable du Smur de l'hôpital de Morez. Si eux ne sont plus là, à proximité, ce sera très compliqué d'assurer les urgences. On n'a qu'eux dans notre secteur. Le personnel est qualifié et a toujours assuré un service pointu et professionnel. On peut aussi confirmer qu'ils ne sont pas forcément appelés par le Samu puisqu'il nous" est arrivé de tomber sur les pompiers lors d'interventions à domicile. Comme j'ai le numéro des Ambulances des 4 villages, je les ai appelés pour savoir pourquoi ce n'était pas eux sur place. Et ils m'ont répondu qu'ils n'avaient pas été déclenchés... »